Cette moto restera pour nous une énigme... Il faut bien avouer que si nous avions parcouru seulement quelques dizaines de kilomètres à son bord, le bilan de cet essai aurait sans nul doute été assez défavorable. Avec son poids de près de 300 kg avec les pleins et sa hauteur intimidante, cette version spéciale de la R 1150 GS s'avère délicate au quotidien et encore moins à sa place sur les roulages hors piste auxquels les campagnes publicitaires la promettent. Mieux vaut alors oublier tout de suite vos projets de grands raids à son bord et bien comprendre que l'Adventure est à la moto ce que la plupart des gros 4x4 grand public sont à l'automobile : de la technologie, du design, du rêve et... une grande routière. Car c'est dans ce contexte que la BMW joue paradoxalement ses meilleures cartes, pourvu que vous possédiez vous-même un gabarit avantageux et une véritable expérience de la moto.
Un coup à prendre...
Le premier
contact avec la bête est décisif. Impressionnant. Nul besoin de chercher ses
mots, l'équipement et les réglages ont transfiguré la BMW. Pourtant, peu de
choses différencient l'Adventure de la GS standard. Mais elles font oublier
tout le reste ! Son gros réservoir (optionnel) et ses suspensions rehaussées
(en série) semblent avoir littéralement gonflé ses proportions. Sa déco, ses
pièces mécaniques omniprésentes, ses jantes à rayons et sa selle haute vous
transportent immédiatement dans le paddock du Paris Dakar. Sa prise en mains,
elle, vous ramène à la dure réalité. De trail grand public, la GS s'est muée
pour l'instant en un pachyderme mécanique. On le mesure déjà lors des seules
manoeuvres à l'arrêt, qui nécessitent d'empoigner fermement le guidon d'une
main et le rebord de la selle de l'autre pour pouvoir espérer bouger l'ensemble
sans se laisser embarquer... Un coup à prendre, mais pas le seul. En fait,
entre elle et vous, tout se joue là, au moment de la prise en mains, la bien
nommée. Reste ensuite à monter à bord, lever la jambe bien haut, poser les
pointes de pieds au sol (pour les - de 1,75 m) et maintenir la moto en
équilibre sans, surtout, la laisser trop pencher. Toujours d'attaque ? Tant
mieux, vous avez presque fait le plus dur. Reste ensuite à s'élancer. Le bruit
de 2 CV, le couple de renversement ou les claquements de boîte à froid si vous
n'avez pris la peine de débrayer à fond, tout y est. Du 100% BMW, mais du 100%
Adventure. Perché à 890 mm du sol, cette impression de dominer la route ne
cesse de vous stresser au début... puis de vous flatter par la suite. C'est
agréable, presque sécurisant, tant qu'il ne faut pas subitement poser le pied à
terre ou tailler son chemin entre les voitures... Réservoir plein, la GS
réclame habileté, anticipation et poigne à basse vitesse. Ce poids très présent
à l'avant l'handicape sensiblement dans les virages serrés ou les slaloms. Mais
peu à peu, on s'y fait, pour ne (presque) plus y porter attention, excepté en
cas d'imprévu. Malgré tout, cette Adventure reste une GS. Et ça, c'est magique
lorsque l'horizon se dégage. L'ergonomie de bord dévoile alors tout son agrément.
La nouvelle selle, plus étroite et ferme que la double selle d'origine, ne pose
pourtant guère de soucis. Les commandes sont agréables, la boîte de vitesses
toujours un peu lente mais en tout cas précise et douce. Pour sa part, le
cardan retransmet discrètement la cavalerie à la roue arrière. Et le flat twin,
fournit ses percherons sans trop compter. Bien protégé derrière la bulle
trépidante, il ne reste plus qu'à apprécier l'excellent guidage de l'ensemble.
Un rail.
Rugueux et exigeant
Pataude tout à
l'heure, la GS a retrouvé sa bonne foulée. Et nous, ce train avant épatant de
confort et de rigueur. Cette fois, l'amortisseur White Power apporte la
dernière touche. Petites bosses, grosses compressions, longs appuis en courbe,
la moto file avec une sûreté apaisante. Avec la vitesse, elle retrouve son
agilité et fait presque oublier son poids au moment de l'inscrire sur l'angle !
Sur terrain sinueux, bosselé mais pas trop escarpé, la GS offre ainsi des
sensations de vitesse inattendues dans un confort optimal. A tel point que les
gros freinages deviennent une formalité. L'ABS Integral est l'autre point fort
de cette partie cycle. Il sollicite ici les disques avant et arrière en tirant
le levier droit. Autant dire que le résultat est impressionnant. La GS
s'enfonce à peine sur ses suspensions tandis que la vitesse décroît très vite
au compteur. Facile à doser, même pour de simples ralentissements, le freinage
assisté BMW dans cette version "Sport" présente une efficacité quasi
idéale. Puisqu'il est débrayable et que le frein arrière, pour sa part, reste
indépendant. Ce qui permet par exemple de "tendre" la moto en virage
ou de doser sa vitesse précisément pour slalomer entre les voitures. Le moteur
quant à lui ne mérite pas autant d'éloges. On le connaissait disponible et
agréable, il est devenu rugueux et exigeant. Problème propre à notre moto
d'essai ? Le staff technique BMW nous informe que la programmation n'a pas
changé sur ce modèle prévu pour un usage francophone en réglage standard (une
programmation différente est possible pour les essences de basse qualité). Certes,
le flat twin R 1150 reste dans l'absolu un grand moteur, facile à exploiter et
musclé. Mais il vibre ici comme jamais ! Acceptable sur la première moitié de
la plage de régime, ce phénomène prend de l'ampleur vers 4 000 tr/min et
devient vraiment gênant dans les repose-pieds (pilote et passager) à partir de
5 000 tr/min, soit en croisière à 150 km/h compteur. C'est d'ailleurs aussi à
partir de ce régime que le flat pousse pour de bon jusqu'à près de 7 000
tr/min. En comparaison de la GS standard, l'Adventure tire plus court en 6ème
afin de s'affranchir plus facilement de sa charge. Elle peut même recevoir un
premier rapport et une transmission finale eux aussi démultipliés. Mais en
roulage de croisière assez rapide, c'est à dire là où cette moto est la plus à
l'aise, ce choix de transmission courte accentue encore les vibrations
puisqu'il fait tourner le moteur plus vite. En conséquence, on en vient vite à
"rendre la main" pour apprécier le meilleur de la mécanique et
l'autonomie du gros réservoir.
Transport d'imagination
Lors des 900 km
parcourus à son bord, nous sommes à chaque fois passés en réserve aux alentours
des 370 km ! En descendant, nous avions alors un peu mal aux fesses, les pieds
légèrement ankylosés. Mais partagions aussi le bonheur sincère d'aligner les
kilomètres sur cette moto étonnamment efficace et en tout cas, attachante. Car
même sans sortir de l'hexagone, l'Adventure, comme l'Africa Twin en son temps
et la plupart des gros trails actuels, possède aussi cette qualité étonnante de
transporter votre imagination, et cette fois bien au delà des frontières. Cette
magie-là réclame en contrepartie des sacrifices évidents et pesants (hors
piste..., utilisation quotidienne, budget notamment). Bref, si on craque pour
une Adventure pour son look, sa rareté ou son équipement, il faut bien garder à
l'esprit qu'une GS standard reste bien plus efficace en usage quotidien et à
peine moins sur piste entre les mains d'un pilote normalement expérimenté.
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Cette Adventure
reste avant tout très proche de la GS standard. Elle s'en distingue par des
aménagements destinés à une utilisation au long cours, sur bitume et piste
dure. Afin de supporter la charge et de conserver un comportement correct, les
débattements de suspension sont augmentés de 50 mm à l'avant et à l'arrière
(210 mm / 220 mm). L'amortisseur arrière d'origine est remplacé par un élément
White Power dont l'enfoncement se durcit à mesure que la compression augmente.
On retrouve sur cette machine les nouveaux freins Evo, introduits sur les
modèles R et RT (disques avant diam. 305 mm, étriers 4 pistons, durites
tressées inox), disponibles avec l'option ABS (en version "sport")
qui peut être coupée en tout-terrain. Inchangé, le moteur peut cette fois
fonctionner à l'essence ordinaire. Pour ce faire, il suffit d'enficher une
prise de codage optionnelle (shunt) dans le boîtier électronique. On active
alors une cartographie d'allumage spécifique, néanmoins compatible avec
l'essence sans plomb. Sur demande, il est possible de bénéficier de sixième et
premier rapports de boîte courts (notre modèle d'essai était doté de la 6ème
courte).
Côté
équipement, cette BMW porte une attention particulière à l'ergonomie et aux
capacités de charge. La selle monopièce permet au pilote de s'installer près du
réservoir dans les passages délicats ou plus en arrière en condition normale.
Elle peut accueillir deux personnes sans trop de soucis. Une option selle basse
est prévue (- 3 cm, soit 87 cm du sol, quand même...). Le nouveau support
renforcé propose plus de possibilités pour amarrer les bagages. Le déflecteur
plus volumineux abrite correctement le buste et la tête, les protège-mains sont
prévus en équipement standard. Le moteur reçoit un solide sabot de protection
en alu.
Le cockpit est
doté d'une prise de 12 volts pour le branchement d'accessoires comme le GPS, la
déroulette de roadbook ou un spot pour la lecture de carte. On note aussi une
nouvelle déco : caches culbuteurs peints et jantes aluminium anodisées bleu,
habillage blanc aluminium métallisé / selle gris et rouge ou habillage noir /
selle mandarin et noir. Il est dommage que l'équipement qui concourt tant à
l'esthétique de l'engin ne soit prévu en série, notamment le gros réservoir.
En options :
·
bagagerie en aluminium (porte-bagages, deux valises latérales - 39
litres à droite et 36 à gauche - et le top-case - 30 litres - avec support),
·
réservoir de 30 litres,
·
sacs intérieurs imperméables et inusables,
·
pare-cylindres,
·
grille de phare,
·
antibrouillard,
·
pneus à gros crampons.
Moteur
: 1 130 cm3, 2 cylindres à plat, alésage 101 mm X course 70,5 mm,
refroidi par air, 1 ACT et 4 soup./cyl., injection électronique, 6 vitesses,
transmission par arbre et cardans
Puissance 85 ch. (62,5 kW) à 6 750 tr/min, couple 9,8 daN.m à 5 250 tr/min
Partie cycle : module AV / moteur porteur, fourche Telelever, mono-amortisseur AR, freins (ABS Integral en option) AV 2 disques diam. 305 mm / étriers 4 pistons - AR disque diam. 276 mm / étrier 2 pistons, pneus de l'essai Bridgestone Trail Wing BT 110 : AV 110/80 x 19 - AR 150/70 x 17
Gabarit : empattement 1 501 mm, chasse 121 mm / angle 26 °, hauteur de selle 900 mm, réservoir 22 litres (option 30 litres), poids à sec 253 kg
Performances :
vitesse compteur |
vitesse réelle |
régime moteur |
90
km/h |
82
km/h |
3
000 tr/min |
130
km/h |
116
km/h |
4
200 tr/min |
180
km/h |
164
km/h |
6 600 tr/min |
Vitesse maxi env. 200 km/h, conso moy. de l'essai : 6,9 l. / 100 km, autonomie moy. de l'essai avant réserve env. 370 km (avec réservoir 30 litres)